Dr Bradley Quon : Étudier l’inflammation à l’ère de Trikafta 

Le Dr Brad Quon, chercheur-clinicien à la University of British Columbia, pose des questions audacieuses et urgentes alors que les modulateurs de la CFTR comme Trikafta ont des retombées révolutionnaires : L’inflammation est-elle toujours un problème? Qui doit encore prendre des traitements, en plus de Trikafta? Comment pouvons-nous personnaliser les soins pour répondre aux besoins de tous les patients? 

Les réponses qu’il tente d’obtenir comptent beaucoup pour les personnes atteintes de fibrose kystique (FK), lesquelles vivent plus longtemps et plus pleinement, mais doivent encore surmonter des défis au quotidien. Les travaux du Dr Quon révèlent pourquoi l'arrivée des modulateurs n'a pas mis fin à l’histoire de la FK mais l’a modifiée. 

Le projet de recherche actuel du Dr Quon, financé par Fibrose kystique Canada, se fonde sur l’étude observationnelle CAN-Impact, qui vise à comprendre les répercussions de Trikafta sur la qualité de vie, la santé pulmonaire et plus encore. Il porte principalement sur l’inflammation et comment Trikafta influe sur celle-ci, et ce que cela signifie pour la santé à long terme. Le projet prévoyait un suivi initial des patients pendant deux ans après le début du traitement par Trikafta. On suggère maintenant de prolonger cette période de suivi pour atteindre cinq ans. 

L’équipe de chercheurs prélève des échantillons sanguins afin de faire le suivi des biomarqueurs – des paramètres mesurables dans le corps pouvant indiquer comment la santé ou une maladie évolue – et ainsi déceler des signaux révélant l'activité du système immunitaire au fil du temps.  

« Nous avons constaté que l’inflammation diminue après le début du traitement par Trikafta mais, fait intéressant, qu’elle recommence à augmenter après environ deux ans, explique-t-il. Pourquoi? » 

L’inflammation, même faible, peut sournoisement nuire aux résultats sur la santé, entraînant une fatigue ou un déclin de la fonction respiratoire. Le but de l’équipe est de comprendre ce qui se joue en coulisse, même quand les patients se sentent mieux. 

Un nouveau chapitre 

Bien que Trikafta ait changé la vie de nombreuses personnes, il ne diminue pas la complexité de la FK. Ce médicament ne convient pas non plus à toutes les personnes fibro-kystiques : un pourcentage de la population FK canadienne se retrouve encore sans traitement efficace.  

« Certains de nos patients ressentent encore une fatigue et d'autres symptômes, malgré une amélioration de leur fonction respiratoire. » 

L’équipe du Dr Quon a découvert une corrélation entre les marqueurs de l’inflammation et les scores globaux de bien-être obtenus aux questionnaires sur la qualité de vie. Il s'agit là d’une preuve que l’inflammation persistante peut continuer de nuire à la vie quotidienne. Ses travaux de recherche pourraient avoir des répercussions considérables en orientant la mise au point de nouveaux traitements anti-inflammatoires et en aidant les cliniciens à décider qui en a encore besoin.  

« Il ne s’agit plus de prescrire tous les traitements à tous les patients, indique-t-il. Nous pouvons désormais nous servir de biomarqueurs pour personnaliser les soins. » 

Au-delà du laboratoire 

En tant que chercheur-clinicien, les rencontres au quotidien du Dr Quon en clinique l'aident à définir les recherches qu’il effectue dans son laboratoire et à rester bien centré sur les préoccupations de la vraie vie. Il est plus important que jamais de mener des travaux pertinents, étant donné que la communauté FK a de nouveaux besoins.  

« Trikafta aide les poumons, mais il y a tant d’autres aspects à couvrir : santé mentale, vieillissement et diabète, par exemple. Nous devons traiter la personne dans son ensemble, et non seulement un aspect de la FK », explique-t-il. 

Le Dr Quon croit en l’importance des ressources en santé mentale et souligne le manque de soutien à cet égard dans les cliniques de FK du Canada. 

La vision à long terme  

Les objectifs des travaux du Dr Quon sont clairs : comprendre l’inflammation dans différents systèmes organiques, cibler les patients qui ont besoin de plus que des modulateurs de la CFTR seuls, et permettre la mise au point de médicaments qui ciblent l’inflammation.  

En plus de ces objectifs, les échantillons sanguins recueillis pourront servir à des travaux de recherche ultérieurs. Le Dr Quon collabore déjà avec un autre chercheur pour explorer comment Trikafta pourrait (ou non) ramener les valeurs lipidiques liées à l’inflammation à la normale chez les personnes fibro-kystiques. 

Il a bon espoir que les soins personnalisés de la FK deviennent réalité.  

« Nous procédons déjà au phénotypage pour définir les sous-groupes de l’inflammation, indique-t-il. À l'avenir, nous pourrions pouvoir dire : vous avez encore ce type d’inflammation. Voici un traitement qui le cible. C'est ce genre de soins que nous voulons offrir. » 

Il demeure par ailleurs très engagé envers les patients qui ne sont pas encore de bons candidats pour les modulateurs. Son équipe teste des cellules nasales pour faire valoir l'accès aux modulateurs de la CFTR pour les personnes porteuses de mutations rares. 

Le mot de la fin pour la communauté  

Le Dr Quon tient à remercier les patients atteints de FK pour leur soutien continu.  

« C'est la générosité de la communauté FK qui nous permet de recueillir et d'analyser des échantillons, affirme-t-il. Ces travaux ont une pertinence directe pour les personnes atteintes de FK d'aujourd’hui. » 

C'est avec modestie qu’il reçoit le prix Erik et Birthe Andersen du chercheur émérite reconnaissant la contribution exceptionnelle d’un chercheur de renom dans le domaine de la FK, et il s’empresse de partager le mérite.  

« Il s'agit d’un effort collectif. Ce sont les patients, les coordonnateurs de recherche et les chercheurs des six centres qui ont rendu tout ça possible. » 

Alors que le paysage de la FK continue d’évoluer, les travaux du Dr Brad Quon nous rappellent que, même à l’âge des traitements révolutionnaires comme Trikafta, il reste encore du chemin à parcourir.