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Dr Fabrice Jean-Pierre : Mettre au jour les combats invisibles qui se jouent dans les poumons FK 

17 novembre 2025

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Image de Dr. Fabrice Jean-Pierre

Les travaux de recherche du Dr Fabrice Jean-Pierre se penchent sur un problème que de nombreuses personnes atteintes de fibrose kystique (FK) connaissent intimement : les infections respiratoires chroniques. Même si des traitements comme Trikafta améliorent la fonction respiratoire et la qualité de vie globale de nombreuses personnes, des bactéries comme Pseudomonas aeruginosa (PA) continuent d’être présentes, d’évoluer et de résister aux traitements. Avec le temps, PA peut entraîner une inflammation et des lésions tissulaires marquées dans les poumons, ce qui contribue au déclin de la santé pulmonaire. 

Pendant des décennies, les chercheurs ont étudié les infections en partant de l’idée qu’un seul type de bactéries était responsable de tous les dommages. Mais le Dr Jean-Pierre, professeur adjoint à l’Université de Sherbrooke, a vu les choses différemment.  

« Les poumons touchés par la FK ne sont pas colonisés par un seul microbe, explique-t-il. Ils sont plusieurs à cohabiter, et ils communiquent entre eux. »  

Cette « communication » se déroule dans des structures qu’on appelle biofilms polymicrobiens – soit des communautés complexes et gluantes de bactéries, qui travaillent de concert et se protègent les unes les autres contre les traitements. Dans son laboratoire, le Dr Jean-Pierre conçoit des modèles sophistiqués de ces communautés microbiennes, en reproduisant le milieu faible en oxygène et riche en nutriments que représente un poumon FK. Ses travaux ont révélé quelque chose d’essentiel : quand des microbes comme Staphylococcus aureus (SA) ou Prevotella sont présents, Pseudomonas aeruginosa (PA) est plus difficile à éradiquer.  

« Staphylococcus semble produire une molécule qui aide Pseudomonas à former des biofilms plus résistants, dit-il. Et, plus il y a de biofilms, moins les antibiotiques sont efficaces. »  

Ces travaux de recherche pourraient changer un jour le traitement des infections respiratoires. Si les médecins arrivent à comprendre comment les communautés bactériennes se comportent et comment elles s'aident à être plus fortes entre elles, ils pourront choisir des traitements efficaces. Cela donne aussi l’occasion de repenser l’usage qu’on fait des médicaments existants. Le Dr Jean-Pierre fait équipe avec d'autres chercheurs pour tester des centaines de médicaments déjà approuvés et voir si certains éliminent de manière inattendue Pseudomonas dans un milieu peuplé par diverses bactéries.  

« Nous constatons que certains médicaments ne sont pas efficaces contre Pseudomonas quand elle est seule, mais deviennent puissants au sein d’une communauté, explique-t-il. Cela pourrait mener à de nouvelles options de traitement plus rapidement et à moindre coût. »  

Financer l'avenir 

Le Dr Jean-Pierre a reçu une bourse de chercheur en début de carrière en 2024, financée par Fibrose kystique Canada – sa première bourse de recherche canadienne dans le domaine de la FK depuis la fin de son stage postdoctoral réalisé aux États-Unis. 

« Ce soutien a une grande valeur, indique-t-il. Il signifie que des gens croient au potentiel de ces travaux pour changer la vie des personnes atteintes de FK. »  

Il a consacré plus de 15 ans à l’étude de Pseudomonas aeruginosa et tient à remercier ses mentors pour leurs conseils et pour l’avoir inspiré dans la conception des modèles polymicrobiens qu’il continue de peaufiner aujourd’hui.  

« Ça prend un village. Je suis ici grâce à des mentors exceptionnels qui ont cru en moi – même après mon départ du milieu universitaire. » 

Un laboratoire fondé sur la curiosité  

À l’Université de Sherbrooke, le Dr Jean-Pierre dirige un laboratoire auquel participent un nombre croissant d’étudiants, tous animés d’une passion commune pour la découverte. Il donne aux étudiants les outils, les conseils et la liberté nécessaires pour répondre à des questions judicieuses – une approche d’encadrement qui a déjà mené à des percées percutantes dans ce laboratoire.  

Cette ouverture d'esprit ne se limite pas au laboratoire. Le Dr Jean-Pierre a publié des protocoles sur ses modèles de FK, afin de permettre à d'autres chercheurs d’étudier des biofilms polymicrobiens au sein de leur propre laboratoire.  

« Des gens d’un peu partout nous demandent par courriel s’ils peuvent utiliser notre modèle. Je suis ravi que d'autres s’appuient sur nos travaux. »  

Garder le lien avec la communauté FK  

Le Dr Jean-Pierre est à l’écoute des personnes fibro-kystiques et suit les forums de cette communauté pour rester enraciné dans les expériences vécues. Il veut que les membres de la communauté FK sachent que son équipe est accessible, axée sur la collaboration et prête à répondre aux questions qui comptent le plus pour eux.  

« Sans la communauté, nous n'avons rien sur quoi se baser. J'adore quand les gens nous posent des questions et nous racontent leurs expériences – cela pourrait guider mes travaux en laboratoire. » 

Quand on le questionne sur son appartenance à la communauté de la recherche sur la FK, le Dr Jean-Pierre est très enthousiaste. Il la décrit comme le groupe le plus tissé serré qu’il connaît, au sein duquel la collaboration et le soutien passent avant la compétition. Son engagement envers l'avancement de la recherche sur la FK est profondément ancré, et il prévoit poursuivre ses travaux le plus longtemps possible. 

Il voit l'avenir de la recherche sur la FK avec optimisme, mais sait que le combat n'est pas terminé, surtout pour venir à bout des infections. Son laboratoire continuera de poser des questions audacieuses, de tester de nouvelles associations et de repousser les frontières du possible.